LES CASTORS (ou l’histoire de l’Institut Luxembourgeois de Pensée Systémique)

Il était une fois, il y a bien longtemps, au siècle dernier, une petite famille de castors qui habitait dans les contrées boisées du pays appelé autrefois Comté d’Ermesinde.

Comme tous les castors, qui aiment autant la vie dans l’eau que celle sur terre, ils passaient leurs journées à planifier, construire et entretenir les canaux et réseaux. Ils adoraient aussi écouter les animaux de la forêt, les poissons et les grenouilles du ruisseau. Leur travail les passionnait.

Certains des castors étaient spécialisés dans la recherche des branches solides pour la construction de barrages solides, d’autres castors ‘géographes’ trouvaient les meilleurs emplacements.

Encore d’autres s’occupaient des jeunes castors et leurs transmettaient leur savoir-faire.

De temps en temps les castors se réunissaient après les longues journées de travail, avant de retrouver chacun son terrier douillet, pour se raconter des histoires, échanger sur la meilleure façon de construire des réseaux et aussi partager un bon repas.

Après de nombreuses années, les castors avaient fini par perdre un peu de leur énergie; bien qu’ils n’arrêtaient pas de construire, ils se sentaient fatigués pour continuer leurs discussions. Même s’ils  n’avaient pas l’habitude de se reposer pour hiberner, comme le font les hérissons, les loirs et les marmottes, ils décidèrent d’arrêter leurs échanges pour quelque temps.

Après un long hiver, les castors ont commencé comme tout bon rongeur à se reproduire. La communauté s’est aussi agrandie en accueillant des castors immigrés, venus voir si l’herbe ou plutôt le bois était plus tendre de ce côté du fleuve.

Cette sève fraiche a amené les castors à se moderniser. Ils ont fait appel aux esprits des réseaux résolus à câbler l’infini et ont informatisé leur barrage pour le mettre en réseau avec les autres castors du monde entier intéressés par leur petit barrage. Ils se sont aussi affiliés au mouvement européen de défense et de promotion des idées des castors qui pensent que toute communauté de castor appartient à un écosystème et se doit d’en tenir compte pour vivre en harmonie ! Ils sont d’ailleurs prêt à aller porter leurs idée jusqu’à Athènes chez le grand Castor et son frère Pollux.

Il a fallu ensuite s’adapter au changement de courant du fleuve luxembourgeois et s’activer pour ne pas finir sur une voie de delta non irriguée et vouée à la sécheresse. Pour ça il a fallu s’accorder ou se raccorder à la nouvelle source, comprendre la loi des marées et en bon ingénieurs des fluides et des systèmes, s’adapter aux nouvelles règles du fleuve et repositionner le barrage pour garder une eau claire et vivifiante.

En effet, pour s’établir durablement, le castor, cet animal semi-aquatique, a besoin d’eau permanente (60 cm de haut au minimum). Si le niveau de l’eau descend en été, il construit une digue pour l’élever de manière à ce que l’entrée de son gîte soit toujours immergée et invisible. Il a besoin de branches qu’il se procure sur les arbres et buissons rivulaires (saules, aulnes, ormes, peupliers…) des cours d’eau, lacs étangs ou zones humides boisées.

Cette petite description éclaire sur les besoins fondamentaux du castor à savoir : être à la fois dans l’eau, la vie mais aussi dans l’air, la pensée, être proche des arbres, des branches des racines pour pouvoir les tailler et en faire des sculptures et de vivre dans un gite invisible… C’est pour cela que les castors ont l’habitude de devoir concilier et travailler avec les secrets. Et qu’ils ont décidé de se réunir aujourd’hui pour échanger autour de ce thème.

(écrit par Sébastien DAWANT et Marie Jeanne SCHON à l’occasion du séminaire organisé par l’ILPS avec Camille LABAKI le 18 mars 2016)

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